SAINT PAOL et l’EVECHE DU LEON
- par le Père Maxime LE
DIRAISON -
VIE DE SAINT PAOL
AURELIEN
(Paol /Paulus
Aurelianus)
Paol est né vers 492 à Panohen dans le Clamorgan en Cambrie du sud.
Enfant noble destiné à la guerre, il est finalement envoyé à l’école monastique
dans l’île de Cadley devant son obstination à s’éloigner du monde. Saint Iltud,
ancien chef de guerre d’Arthur, dirigeait d’une main de fer cette pépinière de
saints, où il forma notamment Gildas, Samson, David, Malo, Brieg, Gireg et tant
d’autres.
De cet abbé à la si féconde progéniture spirituelle, Gildas raconte
la réponse qu’il fit aux chefs bretons qui lui faisaient reproche de détourner
la jeunesse noble de ses devoirs militaires. Iltud répondit qu’il se savait
plus utile à sa patrie elle-même en oeuvrant pour le salut des Bretons, plus
qu’à couper encore quelques têtes de Saxons. L’avenir lui donnera raison
lorsque ses disciples feront traverser la mer à son peuple, pour fonder une
nation en Armorique.
Paol sera de ceux-là. Après douze ans auprès de son maître, au
cours desquels il acquit une réputation bien établie de maîtrise sur les
éléments naturels. Ce fut lui qui imposa une limite à la mer un jour de
tempête, préservant le monastère que la marée menaçait. Ce fut lui encore qui
rassembla les oiseaux qui dévastaient les cultures du monastère, les amena
devant Iltud, qui les bénit et leur enjoignit de se nourrir ailleurs.
Il obtient ainsi de son maître l’autorisation de mener une vie
d’anachorèse sur un îlot distant du monastère, où il resta six années dans une
austérité extrême.
Ordonné prêtre à 22 ans par l’évêque de Gwickastel (devenu
Win-chester), il rassembla une douzaine de moines et fonda un premier
monastère, qu’il quittera bientôt pour se rendre à la cour du roi Marc’h de
Cornouailles (l’époux d’Isolde), qui désirait se l’attacher. Voulant échapper à
la charge épiscopale, Paol s’enfuit alors chez sa sœur Sicofolla, abbesse d’un
monastère au bord de la mer, où il renouvela le miracle de l’île Cadley.
De là, il s’embarqua pour l’Armorique, avec ses douze compagnons.
Il aborda à Ouessant, où la paroisse de l’île porte son nom : Lan-Paol (Lambaol). Gagnant le
continent, il séjourna au plou de Telmedaw (Ploudalmézeau), où il fonda un
autre « lan » (Lambaol-Gwitalmeze). Poursuivant sa route vers l’Est,
il fonda Laniltud en mémoire de son maître, traversa l’Aber-Ac’h, où cette
nouvelle étape porte son nom associé à l’un de ses disciples : Lambaol-Plouarzel. Un autre de ses
moines, Jaoua, s’installa en ermite au lieu dit Prad-Paol, où se trouve encore la chapelle Saint Jaoua. Paol arriva
finalement à l’ancienne cité fortifiée d’Occimor qui deviendra Kastell-Paol. Il
y apprit que le chef du territoire se trouvait à l’île de Batz. Il s’y rendit
aussitôt, pour y reconnaître le comte Withur, un sien cousin venu en Armorique
auparavant avec son clan.
Withur est un homme de Dieu qui voulut aider le saint de tout son
pouvoir. Il lui remit la cloche, indispensable au moine itinérant breton ou
irlandais, miraculeusement découverte dans le ventre d’un poisson. Elle est
encore vénérée en la Cathédrale du Léon, sous le nom de Hir Glas, et guérit les migraines.
L’île de Batz était alors dévastée par un affreux dragon que Withur
avait vainement essayé de détruire. Saint Paol passa la nuit en prière et prit
à l’aube la tête d’une procession, qui l’accompagna jusqu’à l’antre du
monastère. Avec l’aide d’un jeune homme de Kleder, il entoura le cou du dragon
de son étole et le conduisit jusqu’au
gouffre, encore appelé : Toull ar
Sarpant, où celui-ci se jeta à l’eau et disparut.
A l’instar des autres saints saurochtones, on verra dans cet
épisode de la vie de Saint Paol, une figure antique du triomphe de la foi
chrétienne sur le paganisme, la victoire de la sainteté sur le démon qui
dévaste l’âme, ou simplement une allégorie de la puissance de Dieu telle
qu’elle se manifeste dans Ses apôtres. Ces considérations ne s’excluant
nullement, disons avec Lobineau que « c’est au lecteur à en faire tel
jugement qu’il voudra ». Paol reçoit de Withur l’île de Batz, où il fonde
un premier monastère, puis un second à Kastel qui deviendra l’Abbaye-Evêché du
Léon. Auparavant, Paol chercha de nouveau à échapper à la consécration
épiscopale, en se rendant auprès de Childebert à Paris. Averti par le comte du
Léon, le roi Franc s’employa à faire plier Paol, le retenant jusqu’à ce que
celui-ci acceptât finalement d’être consacré en l’an 530.
De retour en Armorique, Paol s’appliqua à sa charge avec une ardeur
sans pareille, fondant quantité de monastères selon l’usage celtique :
Kerlouan, Plougar, Lambaol-Gwimilio, Ar Releg, Lokmazhew, aidé notamment par
son condisciple, Saint Gireg, puis d’autres compagnons d’exil que sa Vita
énumère : les Saints Jaoua, Tegoneg, Sieq, Gouezeg, pour ne citer qu’eux.
Comme beaucoup d’évêques bretons, Paol n’avait qu’un désir :
se retirer dans un monastère pour y finir sa vie dans l’ascèse et l’oraison. Le
sort l’obligea à reprendre plusieurs fois sa crosse d’évêque, avant qu’il ne
puisse se retirer enfin à Batz, où il vécut encore plusieurs années dans une
sainteté manifeste, avant de naître au ciel, chargé d’ans, le 12 mars 572.
L’EVECHE
DU LEON
- Origines du Diocèse du Léon -
Selon les récentes études de B. Tanguy,
seuls deux évêchés existaient dans l’ancienne « civitas » des
Ossismes au IXè siècle :
le diocèse de Cornouaille et celui du Léon. La fondation des évêchés de Saint
Brieuc et Landreger se situerait, en effet, entre 866 et 990 sous le règne de
Nominoe. La fondation du Léon est connue tant par la vie de Saint Pol (884) que
celle de Saint Corentin, rédigée en 1235 à partir d’une version plus ancienne.
Trois donations y président :
1.
Celle du Comte Withur qui pourvoit le
Saint d’une cloche et d’un manuscrit des Evangiles, et lui octroie l’île de
Batz et le castellidum qui prendra
son nom (en breton : Kastell-Paol).
2.
La seconde qui constitue la base
territoriale du diocèse est de Childebert, lors de l’intronisation de l’évêque
à Paris. Celui-ci se voit attribuer en domaine perpétuel cent tribus réparties
dans les pays d’Ac’h et de Léon.
3.
La troisième donation est le fait de
Judual, prince de Domnonea, qui lui attribue le Minic’hi-Paol, ou territoire monastique de l’abbaye, qui comportait
sept paroisses dont Roscoff, Santec et Saint-Pol autour de la cathédrale.
Contrairement aux diocèses de Saint Brieuc et Tréguier, la
fondation territoriale du diocèse est donc ici contemporaine de celle d’une
abbaye-évêché de type celtique et de ses plou
environnants.